Le Lauvitel ou Lac
Lauvitel
Fiche descriptive :
Commune : Bourg-d'Oisans
Localisation : rive gauche du
Vénéon.
Altitude : 1495 m
Superficie : 35 ha
Profondeur : 68 mètres en moyenne, mais variable selon la saison.
Accès : 1h30 depuis la Danchère ou 2h depuis les
Gauchoirs.
Autres noms : Le Lovitel, Lac (de) Lovitel
Carte : TOP25 3336ET
Le Lac Lauvitel ou plus simplement le
Lauvitel est situé sur la rive gauche du
Vénéon quelques kilomètres en amont de son confluent avec
la Romanche. Sa superficie de
l'ordre de 35 ha en fait le plus vaste lac naturel de
l'Oisans et du massif des
Écrins. Ses eaux d'un beau bleu occupe toute
la largeur de son vallon empêchant l'accès pédestre à son amont. La légende
soutient qu'il aurait englouti un village dont la cloche de la chapelle sonne
encore de temps en temps
[Citée par PLR].
Le Fond du Lauvitel à l'amont du lac est dominé par un
magnifique cirque orienté au nord où arrivent encore à se nicher quelques
petites glaciers moribonds faute de renouvellement de la glace. Les anciennes
cartes (minutes de la carte d'état-major au 1/40 000, 1853) montrent que le
delta actuel était un... estuaire et a été comblé. Le Fond du Lauvitel n'est
accessible qu'en barque et les crêtes qui l'entourent n'offrent pas de passages
faciles vers le sud. Il est ainsi classé Réserve intégrale et son
accès est interdit.
Le vallon du Lauvitel et les sommets qui l'entourent sont
rattachés à la zone cristalline
du Rochail qui prolonge vers le sud le massif des Grandes
Rousses. Elle est séparée de la zone cristalline principale du massif des
Écrins par une bande sédimentaire que l'on peut suivre du plateau des
Deux-Alpes au Vallon de
la Muzelle et dans
le haut Valsenestre. Les crêtes descendent peu au-dessous de 2800 m et
dépassent mêmes les 3000 m à la Tête de
la Muraillette
(3019 m) et au Pic du Clapier
du Peyron (3169 m) qui abritent les branches discontinues du
Glacier des Pisses au
fond du vallon.
Le Lac Lauvitel résulte d'un énorme
écroulement rocheux issu des escarpements inférieurs du groupe
du Rochail,
qui a barré la vallée de ses matériaux, en prédominance formés de blocs de
grosse taille. D'après la forme de l'accumulation des
débris, arquée comme une moraine frontale, ceux-ci
se sont probablement accumulés sur le front d'une langue glaciaire occupant
alors l'emplacement du futur lac. Le barrage est complété du côté oriental par
un cône d'éboulis garni d'herbe [M. Gidon].
La faible profondeur de
celui-ci, eu égard à sa surface, inférieure à 70 mètres et de l'ordre de la
hauteur de l'accumulation, n'indique pas la présence d'un ombilic glaciaire.
Le lac est alimenté par
plusieurs ruisseaux et torrents mais ne possède pas de torrent émissaire. Par
contre, de nombreuses sources au bas de la zone d'accumulation des éboulis
indiquent que les eaux s'infiltrent en profondeur et rejoignent plus bas le
cours du Ruisseau du Lauvitel, formé par le Ruisseau de
la Rousse,
qui descend de la zone de décrochement de l'éboulement, et, le Ruisseau
des
Selles
qui draine le flanc nord-ouest de l'Aiguille de
Vénosc
(2830 m).
À la fonte des neiges,
la capacité d'écoulement par infiltration est insuffisante pour évacuer les eaux
de fonte en provenance de son vaste bassin-versant. Le niveau du lac, à son plus
bas à la fin de l'hiver, peut alors s'élever d'une vingtaine de mètres.
Plusieurs ruines de
cabanes dans les rochers, les Cabanes des
Selles
et les Cabanes de Lauvitel ou Lovitel,
rappellent les anciens alpages du Lauvitel. Ceux du fond du
vallon n'étaient accessibles qu'en radeaux. Une cabane existait aussi à 1945 m
au Plan Vianney. Aujourd'hui, c'est la fée EDF qui occupe le terrain avec
une ligne à haute tension qui fait désordre dans
la zone centrale
du Parc national des Écrins.
L'orthographe actuelle de Lauvitel fait, bien sûr, penser
à l'occitan LAU = lac < latin LACUS et incite d'ailleurs à dire le
Lauvitel, plutôt que Lac Lauvitel ou Lac du Lauvitel. Et
pourtant les formes anciennes Lavestellum et Lovestellum au XIVe
siècle et le patois Lau dé Lovité n'accréditent pas cette hypothèse mais
conduisent plutôt à la racine pré-indo-européenne *LAV = pierre,
éboulement, variante de la racine *LAP.
Lauvitel est de la même famille que :
Léatel - minuscule lac à l'est de Theys,
Levetel - lac près du Recoin de Chamrousse,
Lovitel - lac juste avant les Clots à Mizoën,
Lavestelletum au XIVe siècle, Lovestellum au
XVe siècle,
Loyatel ou Loyateu - côte sur la rive nord du
Lac Blanc à Saint-Agnès, Banc des
Laux, pour IGN,
Luitel - lac au nord de Séchilienne, Lovestellum et Loyatel au XIVe siècle.
Tous ces noms, liés à des lacs en Oisans et Belledonne
ont des formes anciennes qui excluent le mot lac mais ramènent toutes à
Lavestellum ou Lovestellum et à la racine *LAV.
Le Lau dé Lovité et tous les autres sont simplement le
Lac de la Pierre, comme il y a un Habert de la Pierre, également à
Saint-Agnès au-dessus du Refuge Jean Collet, avec ici un rappel de sa
formation. Ici, Lac de l'Écroulement pourrait convenir !
Avec la perte de compréhension du sens d'origine apparaît, au
Moyen Âge, le besoin de renommer le lieu. Cette opération s'est effectuée en
général au cours du XIIe siècle. Comme souvent, on aboutit à une redondance.
Pierre, c'était, Pierre, cela restera, avec le vieil occitan ESTEU,
le roman STEU, le vieux français ÉTOC ou ESTOC, l'italien STELO, très employés à
cette époque, signifiant souche, banc, pieu, rocher,
écueil, d'une autre racine pré-indo-européenne EST- = pierre
[DDR],
à rapprocher de l'allemand STEIN.
LAV s'est à peu près maintenu, mais ESTOC est tombé dans
l'attraction de ESTEL ou STELLA, l'étoile, et le mot est devenu
Lavestellum ou Lovestellum.
Dire Lac Lauvitel ou Lac du Lauvitel ne revient
donc pas à nommer deux fois le lac, mais à répéter deux fois la pierre,
avec le mot originel et son doublon moyenâgeux, lui-même issu d'une racine de la
nuit des temps [Toponymie d'après PLR].
Les environs ne sont pas en reste car le Ruisseau de la Rousse
qui descend de la zone de décrochement, n'est autre qu'un Ruisseau de la
Roche et la Combe de la Ruissella au-dessus est aussi une Combe de
la Roche. Quant au Rochail, son nom parle de lui-même ! Que dire
également, du Pic du Clapier du Peyron, sinon qu'il
s'agit du Pic de
la Pierre de la Pierre ...
Deux sentiers partent de façon presque symétrique au-dessus du
lac :
Le premier, au-dessus de sa rive ouest, permet de s'échapper par
le Plan Vianney et son magnifique lac, bien glaciaire celui-là, vers la
vallée de la Malsanne. La Crête de la Montagne qui ferme le vallon
de Plan Vianney est franchie un peu au nord de la Brèche du Périer
(2491 m) en évitant la ligne à haute tension. Il faut ensuite plonger de près de
1700 m pour rejoindre, d'abord les hameaux de Confolens, puis le village
du Périer par une variante du GR54. Une autre variante permet de
rejoindre Valsenestre par le Col de la Roméïou (2439 m) et le
Lac Labarre (2393 m). La Cabane de la Selle
(1902 m), non gardée, permet de couper les étapes.
Le second, plus alpin et plus longtemps
enneigé, au-dessus de sa rive est, monte au Col du
Vallon (2531 m) et permet de rejoindre le Refuge de
la Muzelle (2115 m).
Ces chemins permettent de réaliser des circuits de deux à quatre
jours, par exemple :
J1: La Danchère - Cabane de la Selle par Plan
Vianney,
J2 : Cabane de la Selle - Valsenestre par le Col
de la Romeïou,
J3 : Valsenestre - Refuge de la Muzelle par le
Col de la Muzelle,
J4 : Refuge de la Muzelle - la Danchère par le
Col du Vallon.
NB : étapes à fortes dénivelées. Le Col de la Muzelle peut
être glissant en cas de pluie.
Album photos :
Lauvitel et Lac de Plan Vianney
Album de 31 photos
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