Concertation ou provocation ?
Voici ce que nous écrivions le 19 novembre 2008 :
Concertation de façade mais provocation dans les faits.
Gaston Franco,
le président de la commission de concertation, a joué la provocation ... Bon nombre de participants sont
sortis indignés de la réunion parlant de mascarade ou de parodie de
concertation. Même Nice-Matin n'a pu que constater le vide d'un
Sommet ... de concertation. Suite
question 34.
Néanmoins, 6 groupes de travail sont établis et vont commencer leurs travaux.
Mais le CG06 et son président Christian Estrosi devront
confirmer formellement les déclarations faites au moment du lancement de la
concertation et dissiper le doute qui s'est installé dans les esprits et qui
pourrait faire définitivement capoter le projet. Gaston Franco
ayant refusé de répondre si oui ou non les recommandations issues des
commissions seront prises en compte, la réponse doit venir du niveau
au-dessus, du CG06 et de son président.
Reçu
5 sur 5, ce n'était donc qu'un nième usage de la technique dite de
la pelleteuse définitivement vouée à l'échec. Le
communiqué de presse publié par le
CG06 et daté du 19 novembre n'insiste que sur la volonté écrite noir sur
blanc de mettre en place une méthode de travail collaborative qui
associe les parties prenantes et tienne compte des points de vue
initialement opposés au projet.
Le
compte-rendu officiel gomme lui aussi heureusement toutes les aspérités et
se veut résolument consensuel. C'est bien et on ne peut que s'en féliciter,
mais au lieu
d'avoir ensuite à publier un
communiqué de presse de mise au point et de devoir faire un grand écart avec
la réalité dans le compte-rendu, il
serait à l'avenir souhaitable et plus productif que les comportements soient
d'entrée de jeu en cohérence avec la bonne impression que l'on veut donner
ensuite.
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Fréquentation
Une
analyse de la fréquentation du parc a donné lieu à une situation contrastée
avec une diminution de la randonnée pour le parc mais avec une
augmentation du nombre de randonneurs itinérants mesurée par le nombre de nuitées dans
les refuges du CAF. Mais Gaston Franco rappelle que l'objectif que
s'est fixé le CG est mieux de touristes plutôt que plus de touristes.
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Attente des randonneurs et ses conséquences
L'évolution du monde de la randonnée et les attentes des
randonneurs présentées par le vice-président de la GTA et un Tour Operator
(TO)
local ne diffèrent pas fondamentalement de celles indiquées en préambule à
l'analyse du projet initial et
soulignent également la nécessité d'améliorer les conditions d'hébergement.
Toutefois plusieurs des attentes formulées ne peuvent pas s'appliquer dans
le cadre d'une randonnée itinérante sur plusieurs jours en altitude telle
que le portage des sacs.
L'une restera même comme la perle de la réunion :
les clients du TO n'aiment pas marcher dans la neige et il faudrait déblayer les
névés persistants ! Un peu comme la femme partie pour un trek dans le désert
qui ne voulait pas marcher dans le sable. Pas sérieux. Dans ce cas, il y a
eu en fait tromperie sur le circuit vendu de la part de ce TO mais il ne
s'agit pas d'une attente de la clientèle à prendre en considération. Les niveaux de difficultés et
d'engagement des différents itinéraires qu'il propose ne sont d'ailleurs pas
précisées sur leurs fiches descriptives.
Autre perle : ce TO est obligé de
préparer psychologiquement ses clients à coucher au Refuge des Merveilles
5 jour à l'avance (1). À propos de celui-ci il précise tout de même sur certaines
notices, dépaysement total et nuit en dortoirs et sanitaires
communs. À nouveau il ne faut pas transformer en attente marketing, un mauvais
packaging du produit vendu.
Heureusement, un intervenant a pu préciser que le public
qui ne souhaite pas marcher ni porter son sac n'est pas le public visé dans
le projet. Et oui, en montagne il faut marcher, ça fatigue, on
transpire, on a froid ; il y a du soleil, de la pluie, des nuages, du vent,
des orages qui font boum, boum et peur aux enfants ; ça monte, ça descend, certains passages sont plus
pénibles, plus difficiles, plus exposés que d'autres, les pierres roulent
sous le pied ; il peut y avoir de la neige, de la boue, de la bouse, des crottes. Faut-il
tout déblayer avant le passage des clients de ce TO ?
Au lieu de vouloir adapter la nature et tromper ainsi
le client sur la marchandise qu'il consomme, il
apparaît bien plus essentiel et plus intéressant pour le visiteur
de s'adapter à la nature et à l'environnement qu'il est venu
découvrir. C'est aux Tour Operators à s'adapter aux
contraintes de l'environnement et du Parc National du
Mercantour et non le contraire. C'est la garantie de leur
sérieux. |
Plus sérieusement, on retiendra que le niveau de confort des
refuges est un souci récurrent notamment pour les familles. Pourtant pour
beaucoup, la nuit en refuge est la sortie des vacances et souvent
l'un des meilleurs souvenirs. Voir question 19.
On retiendra également une prise de conscience bienvenue de
l'intérêt des randonneurs pour la découverte des patrimoines naturel et
culturel qui était complètement négligé dans le projet initial.
Si la clientèle des TO est financièrement aisée, elle n'est pas
forcément prête à payer plus pour un confort plus élevé, elle qui trouve
déjà trop élevé le prix des navettes. De toute façon les
prix pratiqués par les TO dans le Mercantour doivent avant tout être
compétitifs par rapport à ceux pratiqués dans les autres massifs alpins. Par
conséquent, le surcoût qu'entraînerait un meilleur confort ne pourrait pas
être répercuté sur le client mais devrait être absorbé par la chaîne des
prestataires ou ... par le CG.
On se retrouve en fait un peu dans la démarche de celui qui
veut le beurre, l'argent du beurre et la crémière en prime.
Gaston Franco qui a dit vouloir voir les comptes prévisionnels des
refuges, leur amortissement car il anticipe des activités fortement
déficitaires et gourmandes en subventions a dû frémir. L'investissement de
20 millions d'euros va-t-il finalement aboutir à un projet tournant ensuite
à coup de subventions, de fonctionnement cette fois, du public vers le
privé, c'est-à-dire vers un futur gouffre financier pour les finances
départementales ? Le beurre serait alors l'investissement sur le
projet, l'argent du beurre les subventions de fonctionnement et la
crémière les bénéfices privés des TO sur le dos de la collectivité. La
question du retour sur investissement est donc clairement posée.
Notes :
(1) On peut d'ailleurs s'étonner de l'instinct moutonnier des TO qui se
précipitent tous en un tel point noir d'autant plus qu'il n'est pas
indispensable de séjourner au Refuge des Merveilles pour visiter le site.
Cela diminuerait d'autant la sur-fréquentation du refuge et permettrait aux
individuels d'en profiter.
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Philosophie
sous-jacente
Le communiqué
de presse du CG fixe la démarche, l'ambition et les domaines de travail. Il
a été tiré aux cordeaux, chaque mot et chaque virgule ont dû être pesés, au
final il dit bien ce qu'il a à dire.
Premier
point, le projet actuel est remis à plat et va être mesurer à tous les
itinéraires qui pourraient être proposés. Il faudra bien entendu définir les
critères de mesure.
Deuxième
point, l'ambition du nouveau projet, car à ce stade il va falloir oublier
l'ancien et tout ce qu'il traîne avec lui de négatif, est de réaliser un
sentier exemplaire par son intégration dans l'environnement, son intérêt, la
beauté de ses paysages et le caractère pédagogique de ses milieux,
patrimoines et activités humaines ... sans oublier le randonneur. On
applaudit. On croit même rêver, on reparle de randonneur. Enfin !
Oubliés le produit, d'appel ou pas, le client, ... Le randonneur tout
simplement, qui n'a nul besoin de TO pour mettre un pied devant l'autre même
dans la neige, et découvrir son chemin et le pays.
L'ampleur des
groupes de travail confirme l'ambition du nouveau projet, avec en
particulier le Centre de ressources biodiversité qui espérons-le sera
le garant de la protection des zones traversées qu'elles se situent ou non
dans le coeur du parc.
Des raisons
de s'inquiéter
Gaston Franco pourrait refaire le coup de la
pelleteuse lors des prochaines réunions plénières dans un rôle de
composition du méchant pour en définitive rejeter les conclusions des
groupes qui lui déplairaient.
L'intitulé du groupe Produit touristique surprend. La marchandisation
du parc national est bel et bien en marche et sous la présidence d'un Tour
Operator de surcroît. Il y a là une regrettable confusion d'intérêt. Au
moins, peut-être celui-ci comprendra-t-il qu'un randonneur qui n'accepte pas de
marcher sur un chemin enneigé ou crotté n'a pas sa place sur l'itinéraire.
Le groupe sur l'Itinéraire et ses variantes est présidé par l'un des
protagonistes de l'épisode de l'été dernier. Aura-t-il fait sa révolution
culturelle pour aller dans le sens des ambitions affichées du CG ?
Espérons-le. De toute façon, il connaît le minimum requis pour un consensus
autour d'un projet respectueux de l'environnement : utilisation des sentiers
et hébergements existants de part et d'autre de la frontière.
Les
hors-d'œuvre terminés, les groupes de travail sont en cours de
constitution et vont devoir vite entrer dans le vif des sujets qui
consisteront à établir entre autres :
La
raison d'être du projet (G1 Projet de territoire).
La
cible en évitant à tout prix le prisme déformant des Tour Operators
qui n'en ont qu'une vision très partielle et déformée et en incluant les
jeunes et les individuels (G2 Clientèles).
La non
marchandisation du parc et la non adaptation de la nature à
une
démarche
commerciale (G3 Produit touristique).
Le
maintien de sentiers non terrassés, non formatés, sans
sécurisation et balisage excessifs dans un esprit 'montagne' (G4
Aménagement des sentiers).
La
reprise des itinéraires et des hébergements existants de part et
d'autre de la frontière, avec passage dans les villages, mais sans nouvel hébergement en site vierge (G5 Itinéraire et ses
variantes).
La
préservation de l'environnement et la protection renforcée
des lieux traversés, notamment hors cœur du parc entre Rabuons et
Isola (Centre de ressources - Biodiversité).
La
découverte des patrimoines naturel, vernaculaire et culturel, des
pratiques et des activités et productions locales, ... avec des
animations de découverte (peut-être G1 Projet de territoire).
L'avenir du
Parc National du Mercantour
Le
PNM doit rester un territoire d'exception où nul ne doit pouvoir y
établir son commerce sur la base d'un produit rapporté, créé de toute
pièce, ne respectant ni les usages et coutumes, ni la loi, ni la
finalité du parc. Celle-ci exclut en particulier l'aménagement de
l'espace naturel pour servir des intérêts économiques et se trouve en
opposition absolue ave le modèle de l'industrie touristique.
Cette
exigence, qui tire le PNM vers le haut en vue de son classement au
patrimoine mondial de l'UNESCO, ne peut que valoriser les activités
des différents professionnels et acteurs de la montagne respectueux de
l'environnement, des patrimoines, des usages et des traditions.
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