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		Situés à l'adret, respectivement à 
		1901 m et 1724 m d'altitude, Allibrands et la Got sont 
		deux écarts d'altitude de Freissinières. Le premier est à l'aplomb 
		des Viollins et le second à l'aplomb des Mensals. Mais on les 
		atteint l'un et l'autre en partant des Viollins.  
		
		Plus haut en altitude, Allibrands 
		a une position en balcon au-dessus de la vallée. On peut aussi le 
		rejoindre depuis la Poua par les Garcines et continuer 
		jusqu'à Dormillouse, par le sentier balcon des alpages. Il ne 
		reste plus que deux maisons en état. Les ruines d'une dizaine d'autres 
		bâtisses montrent l'ancienne importance de l'écart, véritable hameau 
		d'altitude. Au milieu du XIXe siècle, on comptait onze bâtiments ruraux 
		mais déjà quatre masures (1). 
		
		On rejoint rapidement la Got 
		par le sentier balcon que l'on quitte après avoir traversé le Torrent 
		de la Got.  | 
	
	
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		Allibrands - Photo Vallouimages, 25 mai 2018 
		Cliquer sur la 
		photo pour l'agrandir  | 
	
	
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Ce qu'il en reste est aujourd'hui caché au 
milieu des bois, mélèzes et feuillus. Une seule maison est encore couverte. Les 
toitures de deux autres, encore debout en 2007,  se sont effondrées ces 
dernières années. Dans la première moitié du XIXe siècle, quinze bâtiments 
ruraux et un chazal  (2)
constituaient le hameau 
(1).
Le Serre, un troisième hameau situé 
sur un chemin direct entre les deux autres, a complètement disparu, y compris de 
la carte. Il comptait encore six bâtiments ruraux et déjà cinq chazals 
(1, 
2).
	
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		Panorama sur l'Envers de Gramuzat  | 
	
	
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		 La photo est prise vers 2000 
		m d'altitude en montant à l'Adret d'Odeyer.  En chemin, on 
		remarquera que les terrains agricoles de la Got étaient irrigués 
		par un canal qui prenait dans le torrent d'Odeyer, on en voit encore des 
		vestiges.  | 
	
	
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		 Photo 
		Vallouimages - 25 mai 2018 
		Cliquer 
		sur la photo pour le panorama en grand format avec les noms des lieux  | 
	
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L'IGN écrit Allibrands, sans 
article, et Torrent d'Allibrands.  Mais l'usage actuel tend à dire
les Allibrands, peut-être à cause du S qui a été tardivement rajouté. La 
graphie était en effet Allibrand au XIXe siècle (1). 
Le rajout du S final et encore plus l'usage de l'article ne sont pas justifiés.
Ce nom est à rapprocher du lieu-dit les Albrands 
		dans le Vallon du Fournel. 
		Il n'y a pas lieu de les distinguer. Leur origine est commune. 
		Le cadastre de Saint-Crépin mentionne une Combe Allibran ou 
Combe Albrand (3).
Alibrand, Allibrand, Albrand sont des 
patronymes. Il est souvent rattaché à l'ancien occitan alebran qui 
désignait un « jeune canard sauvage » (4) 
utilisé en tant que surnom d'un
« homme vantard » (5).
Mais il pourrait plutôt s'agir d'un patronyme d'origine lombarde 
que des groupes de lombards en provenance du Piémont italien auraient introduit 
au VIIIe siècle, formé sur les racines ali = 
« autre, étranger » et brand =
« tison, épée » (6). 
Les Albrand sont encore nombreux sur les communes de la 
		Roche-de-Rame, Freissinières et Champcella. 
		D'après l'enquête de l'INSEE, le nom semble avoir essaimé en France à 
		partir de la région. On trouve également en Lombardie des 
		patronymes de même origine comme Aldobrandi, Alibrandi, Aliprandi.
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La Got, où le T final normalement 
se prononce, était le Got au XIXe siècle. Autant dire que le genre ne 
correspond à rien de spécifiquement féminin.
Ce nom peut venir soit de HUGOT, diminutif 
en -OT de HUGO (7), 
dérivé de HUGUES, nom de personne d'origine germanique, hug = « intelligence » (8), 
soit, du peuple des Goths (9). 
Par extension, peut désigner tout barbare ou plus simplement étranger.
On aurait donc avec Allibrands et
la Got deux noms ayant en point commun le sens d'étranger.
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La Got est remarquable par son 
mélèze, un véritable 'roi de la forêt', avec un périmètre de base de 
plusieurs mètres. Âgé probablement de 400 à 500 ans, c'est 
un arbre en fin de vie qui a eu une histoire agitée, ce qui en complique 
d'autant plus la lecture. Il n'a pas été possible de le dater précisément par 
analyse dendrochronologique car son tronc est creux. Une tentative de carottage 
dans une grosse branche effectuée par Jean-Louis Édouard  il y a trente ans 
n'avait rien donné car le bois était déjà pourri à l'intérieur. Son âge ne peut 
donc qu'être estimé par comparaison avec d'autres vieux mélèzes remarquables de 
la vallée  (Val Haute, Bois des Vaux 
(10),
la Valerette) (11).
En 2006, il avait déjà perdu la partie 
haute de son tronc mais conservé deux grosses branches qui se disputaient la 
prééminence ! La plus haute et aussi la plus inclinée a cassé la première. C’est 
elle que l’on trouve aujourd’hui au sol au pied de l'arbre. L’autre est en 
quelque sorte protégée par sa verticalité et constitue le faîte de l’arbre que 
l’on voit de loin, par exemple d'Allibrands. La longueur de ces branches 
donne une idée de la hauteur du mélèze avant sa déchéance.
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Notes :
(1) 
Cadastre de la commune de Freissinières, 1834.
(2) 
Dans la région, un chazal (ou chasal) désigne un bâtiment qui tombe en ruine.
(3) 
Pierre Chouvet, Noms de lieux du Pays Guillestrin, Édition Pierre Chouvet, 
Guillestre, 2004, p. 19.
(4) 
Honnorat, 1846, t. 1, p. 75.
(5) 
Collectif, Les noms de famille des Hautes-Alpes, Archives & Culture, 
Paris, 2010, p. 12.
(6) 
Généanet, entrée 
Alibrand. 
(7) 
Faure, 1998, p. 187.
(8) 
Généanet, entrée 
Hugues.
(9) 
Astor, 2002, p. 1000.
(10) IGN, Bois des Veaux.
(11) 
Communications personnelles de Lisa Shindo et de Jean-Louis Édouard, Centre 
Camille Jullian, UMR 7299, CNRS, Aix-Marseille Université, MMSH, 
Aix-en-Provence, mai 2018.