Au début du XXe
siècle, l'ingénieur Gilbert Planche, pionnier de la houille
blanche dans le nord du département des Hautes Alpes, proposa à la
municipalité en échange des droits d'eau -
dont les prélèvements auraient poser des
problèmes pour garantir le fonctionnement du moulin,
d'abandonner le moulin hydraulique de la plaine,
lequel nécessitait par ailleurs de gros
investissements de la part de la commune,
au profit d'une installation moderne assortie d'une scie battante, le tout
fonctionnant à l'électricité fournie par la concession de la prise d'eau de
Prelles pour 99 années. Il fut construit à Saint-Sébastien vers
1911.
On retiendra aussi qu'il
avait aussi été envisagé à cette époque de construire un barrage dans la partie la plus
étroite des gorges qui aurait noyé la plaine de Saint-Martin-de-Queyrières,
ce qui a pu pousser aussi au transfert du moulin
[information à source unique nécessitant
croisement avec d'autres sources].
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Le moulin de
Saint-Sébastien était à la fois une meunerie et une scierie. Il fut utilisé
pour la production de farine jusque dans les années 1960 et en tant que scierie
jusque dans les années 1965/70. L'état de conservation de sa machinerie, des scies
et de son équipement électrique
est remarquable. |
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Novembre 2007 |
Septembre 2007 |
Louis Chiorino
fut l'un des derniers clients de la scierie dans les années 1960 et
Martin Brunel le dernier meunier connu.
Le moulin de
Saint-Sébastien abrite à la fois une meunerie et une scierie :
Côté meunerie, il
comporte un magnifique tarare ou ventoir pour nettoyer le grain à moudre et le séparer de
la balle ; deux moulins complets avec pour chacun : meule gisante et meule
tournante ou barriquet, et trémie d'alimentation ; une potence pour retourner
les meules et refaire les rainures ; un remarquable meuble blutoir avec encore
ses soies pour séparer le son de la farine.
Côté scierie, il
est équipé, d'une part, d'une scie battante, d'un chariot sur rails pour
déplacer les billons, et, d'autre part, d'une scie circulaire sur table. Le
mouvement progressif du chariot équipé d'un système à cliquet permettait
d'amener les billons à la scie battante.
Un seul et unique
moteur électrique situé en sous-sol entraînait, à l'aide d'un système complexe
de courroies, toute la machinerie des deux scies, du chariot et des deux
moulins. Un système d'embrayage également en sous-sol mais piloté du dessus
permettait de faire fonctionner soit la partie meunerie, soit la partie scierie.
L'installation
électrique d'origine se trouve encore à l'étage avec un remarquable
transformateur d'époque (1915/20).
Dans un angle, se
trouve aussi la chambre du meunier. Durant la période de fonctionnement du
moulin (de début juillet pour le seigle à fin juillet, début août pour le blé),
il travaillait en continu et dormait donc sur place.
Le moulin a
toujours été communal mais il était baillé avec un contrat établi avec les
mandataires. Il y en eut quatre différents en un soixantaine d'années de
fonctionnement. Le dernier connu, Martin Brunel, avait par exemple dans
son contrat l'obligation d'entretenir le moulin et de pratiquer des tarifs
préférentiels pour les locaux.
Le moulin et ses
installations font partie des rares témoignages techniques qui nous soient
parvenus en excellent état de conservation. Ils aident à mieux comprendre
l'intégration des nouvelles technologies du début du XXe siècle (passage de
l'énergie hydraulique à l'énergie hydro-électrique, la fée électricité) pour un
usage traditionnel (ancienne pratique de la meunerie par une organisation
sociale communautaire). Le moulin de Saint-Sébastien est sans nul doute
le premier électrifié de ce type à partir de 1911 dans les Hautes-Alpes.
Il n'est plus
utilisé aujourd'hui, un projet d'écomusée pourrait être envisagé pour assurer sa
reconversion à des fins touristiques et patrimoniales. Durant l'été, le moulin
est un point d'information de l'Office de Tourisme du Pays des Écrins
et se visite.
Moulins de Prelles,
Sachas et Bouchier
La commune
comportait un grand de moulins à grains, à noix et à foulon à proximité des
différents hameaux, notamment à Prelles, Sachas et Bouchier.
Prelles a
compté jusqu'à six moulins à grains, noix et à foulon sur le Torrent du Gros
Riou. Il en reste le lieu-dit les Paroirs, autre nom des moulins à
foulon utilisés pour assouplir les étoffes. Les draps de Prelles étaient réputés au début du XIXe siècle à
l'égal de ceux de la vallée de la Guisane.
Les moulins de Prelles étaient utilisés pour produire de l'huile de noix. Comme l'huile de
marmottier, c'était une richesse dans la région où il y avait beaucoup de noyers
et aussi de pruniers. Malheureusement les chatons gelaient une année sur quatre.
On produisait encore 30 litres d'huile par an à Prelles durant la
dernière guerre. En année normale, les noix sont pleines pour fête de sainte
Marie-Madeleine, le 22 juillet, et sont ramassées en octobre. Elles étaient
mises à sécher sur le balcon de la grange, le baouti. Les cerneaux étaient
broyés au printemps au moulin de Prelles. La pâte obtenue était chauffée
dans un chaudron de cuivre puis mise dans le moule d'un pressoir à vis.
On abaissait la poutre à l'aide de la vis pour obtenir l'huile vierge. La pâte
résiduelle, le tourteau, était aussi récupérée pour l'alimentation des hommes et
des bêtes, pour engraisser les cochons en particulier.
Sachas et
Puy-Saint-André avaient en commun six à huit moulins sur le Torrent
de Sachas. Le cadastre napoléonien mentionne un canal des moulins sur
lequel étaient installés le moulin Bermond et le moulin Disdier et
Violin au lieu-dit le Moulin.
Bouchier
possédait lui aussi trois à quatre moulins. Celui qui existait sur le Béal
les Broues dans le virage n'est plus qu'une ruine mais son mécanisme est
encore visible.
Glossaire
Barriquet : Nom local de la meule tournante (de barillet).
Blutoir : Tamis utilisé pour séparer le son de la farine.
Conche : Meule inférieure creusée d'un moulin à noix.
Foulon ou moulin à foulon : Mécanisme destiné à
fouler les draps pour les assouplir. Appelé
localement paroir, paròour.
Le foulonnage
consiste à dégraisser et assouplir les draps de laine dans l'eau. Pour
cela, ils étaient placés dans une cuve remplie d'eau et de terre
glaise, puis frappés successivement par trois paires de pilons mus par
la force hydraulique. Cette opération, en feutrant les fils de laine,
apportait aux draps une douceur particulière.
Gruoir : Meuleton vertical en pierre lourde d'un moulin à
noix. La pierre lourde roule dans la partie creusée de la meule inférieure, la
conche, pour broyer les cerneaux de noix et obtenir la pâte à noix.
Il pouvait également servir à écraser sommairement les grains de céréales
additionnés d'eau pour produire le gruau.
Marmottier :
Prunier
sauvage du Briançonnais dont l'amandon est utilisé pour la production
d'huile de marmotte.
Martinet : Marteau mû mécaniquement ou par l'eau qui sert
à forger les petites pièces de métal.
Paroir, Paròour en patois (prononcer Palòour) : Nom
local du moulin à foulon.
Tarare : Instrument mécanique utilisé pour nettoyer les
grains à moudre. Appelé localement
ventoir, ventoòu.
Trémie : Auge carrée, très étroite du bas, d'où les grains
tombent petit à petit entre la meule tournante et la meule gisante.
Ventoir, Ventoòu en patois :
Nom local du tarare.
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Étude réalisée en collaboration avec
Vincent Leleu, conseiller municipal, que je remercie vivement.
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