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L'exploitation
industrielle du XIXe siècle
La mine fut abandonnée à
la fin du Moyen Âge et sombra dans l'oubli pendant plusieurs siècles.
Néanmoins, quelques timides tentatives de reprises de l'exploitation eurent lieu
au cours des XVIIe et XVIIIe siècles. La plus sérieuse survint en 1785 mais les
troubles de la Révolution aboutissant à la mise à sac des installations
en 1792 lui portèrent un coup fatal.
Il fallut attendre 1834 pour que l'on
s'intéresse à nouveau aux mines. Les vestiges de
l'exploitation de 1785 à 1792 attirèrent
l'attention des ingénieurs de la Compagnie
des Mines d'Allemont et des Hautes-Alpes,
dont le gérant, Surell, déposa une
demande de concession en 1836, accordée pour 23
ha par ordonnance royale le 16 janvier 1838. Un
nouvel établissement est alors construit sur
l'ancien. Une galerie d'écoulement est percée au
bord du torrent et permet d'ouvrir un nouveau
champ d'extraction. Mais la faillite de la
Compagnie vient interrompre brutalement une
exploitation en pleine expansion qui employait
environ 80 ouvriers.
En
1847, l'activité est reprise par l'entreprenant
Duclos de Boussois. Les ateliers sont remis en
état et une fonderie est construite. 10 mineurs
exploitent activement le filon dans la Galerie
d'Écoulement et dans les Vieux Travaux. Mais,
d'embrouilles en embrouilles et couvert de dette,
Duclos doit s'enfuir en avril 1951. La mine
passe alors pour 20 ans sous la direction de
Suquet. C'est durant cette période que
l'exploitation va réellement être prospère, employant
jusqu'à 500 ouvriers et s'accompagnant d'une extension
du périmètre de concession.
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Chantiers du XIXe
siècle - Diverses galeries de roulage |
Photos Vallouimages - Janvier 2006 |
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Chantier boisé |
Salle du pilier |
Boisage du XIXe siècle |
Poutre de soutènement |
Photo CCSTI Saint-Jean |
Photo CCSTI Saint-Jean |
Photo CCSTI Saint-Jean |
Vallouimages - Janvier 2006 |
Cliquer sur les
photos pour les agrandir |
L'établissement
minier est complètement transformé et agrandi, les aménagements hydrauliques et
les ateliers de traitement sont perfectionnés. Les chantiers d'extraction
s'étendent considérablement sous les deux rives du Fournel, sur une
longueur de plus de 400 m et un dénivelé de 150 m. Au dessus de la galerie
principale de roulage et d'écoulement les travaux s'organisent en 8 étages et
communiquent avec le jour par une nouvelle entrée à mi-hauteur. En profondeur,
les ouvrages s'enfoncent suivant le pendage du filon sur près de 50 m de
hauteur, ce qui nécessite l'installation d'une pompe et d'un treuil mus par deux
roues hydrauliques installées dans une chambre souterraine et alimentées par une
dérivation du Fournel.
L'exploitation souterraine
connaît cependant des difficultés. La mine n'échappe pas aux crues de 1856 qui
frappent l'ensemble du Briançonnais. le Fournel inonde totalement
les parties basses de la mine. L'abondance des failles entraîne la multiplicité
des galeries de recherche. Une grande galerie d'écoulement commencée en 1855 à
120 m de profondeur sous l'établissement minier doit être abandonnée en 1858
devant l'extrême dureté de la roche à traverser. Vers 1860 Suquet
connaît des démêlés avec l'administration fiscale.
À la mort de Suquet
en 1871 la mine passe entre les mains de son beau-frère Arnaud,
puis, à la suite d'une contestation, de sa veuve et de son fils Arthur
Suquet. La mine connaît une période de troubles marquée par une mauvaise
gestion et une réduction d'effectif. Les arrêts d'activité entraînent
l'ennoiement des travaux profonds.
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Salle des poutres,
avant et après dégagement |
Puits noyés Nord |
Photo CCSTI Saint-Jean |
Photos Vallouimages - Janvier 2006 |
Photo CCSTI Saint-Jean |
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Berline dans le
Quartier Sainte Barbe |
Berline |
Brouette Quartier Nord |
Photo CCSTI Saint-Jean |
Photo CCSTI Saint-Jean |
Vallouimages - Janvier 2006 |
Photo CCSTI Saint-Jean |
Cliquer sur les
photos pour les agrandir |
En 1875, la mine est cédée
à la société anglaise Charles Grey & Consorts, puis en 1876 à
Argentière Mineral Company Limited. L'exploitation reprend alors un
second souffle, employant à nouveau plus de 200 ouvriers. La grande galerie
d'écoulement est prolongée jusqu'à 600 m du jour et fin 1879 la jonction est
réalisée avec les travaux anciens par un puits remontant de 70 m. Mais le filon
est stérile en profondeur et les travaux sont suspendus.
En 1892, Batigne et
Charlon, héritiers de Suquet, effectuent des recherches
sur le versant nord et dans les travaux abandonnés. En avril, la mine est remise
en activité par la société French Mines Limited avec moins de 30
ouvriers qui travaillent sur des lambeaux de filons négligés par leurs
prédécesseurs. L'exploitation est à nouveau suspendue en juillet 1894.
En 1900, Chabrand et
Pangaud relancent l'exploitation du gisement sur toute son étendue et
font percer de nouvelles galeris, notamment au-dessus du hameau de l'Eychaillon.
En août 1901, la mine est rachetée par la Compagnie des Mines des
Bormettes qui entreprend d'importants travaux de recherche : galerie des
Têtes, galerie Sainte-Barbe, galerie de Romains ... Le plan incliné de la mine
principale est prolongé jusqu'à la grande galerie d'écoulement qui s'ouvre 500 m
en aval de l'établissement minier, ce qui permet de
réaliser une voie de transport souterraine débouchant à l'aval des gorges où une
nouvelle laverie est construite de février 1906 à avril 1907. Elle est
opérationnelle en 1907. Mais les
recherches n'aboutissent pas et la mine ferme définitivement en 1908.
Après la récupération de
la ferraille, la mine sombre dans l'oubli, effacée par le développement de la
végétation, les éboulements des voies d'accès et des galeries, et, les inondations
à répétition du Fournel.
L'établissement minier de
surface
Plan de l'établissement en
1863 - Document CCSTI Saint-Jean
Toute mine importante
dispose d'un établissement dans lequel vont se dérouler les opérations de
minéralurgie. Ainsi dès la reprise de la fin du XVIIIe siècle, furent édifiés
des bâtiments pour renfermer les diverses machines de broyage et de lavage du
minerai. À ces ateliers de préparation mécanique s'ajoutaient d'autres
infrastructures : une forge pour la fabrication et l'entretien de l'outillage et
des machines, un bureau de direction, un magasin d'entrepôt, une cantine, une
écurie pour les mulets qui assuraient le transport du minerai, la Maison du
Directeur, une "charbonnerie", des ponts qui enjambaient le torrent, des canaux
de dérivation, et à certaines époques une fonderie. Pour l'essentiel le minerai
traité était envoyé aux fonderies de Marseille.
Après la crue de 1856 qui
emporte les ponts et sape les berges, il faut reconstruire et rehausser une
grande partie des ateliers. Ensuite l'établissement du Fournel évolue peu et
garde son aspect jusqu'à son abandon à la fin du XIXe siècle. Il subit quelques
transformations lors des reprises par les compagnies anglaises.
En 1906, la
Compagnie des Bormettes met en chantier une nouvelle usine à l'extrémité
de la grande galerie d'écoulement à 500 m en aval de l'établissement minier au
pied du vieux château d'Urgon, donc au-dessus de la vallée de la Durance.
Cette laverie, dite Laverie du Bas, opérationnelle en avril 1907, est à la
pointe des techniques de l'époque : elle est constituée d'un seul grand bâtiment
comprenant 7 étages de traitement. Les matériaux arrivent directement par voie
ferrée, sont déversés au sommet de la laverie dans une trémie et passent
successivement par toutes les phases de traitement. Les machines sont animées
par une seule turbine de type Pelton grâce à une conduite forcée de 40 m
de chute. Il s'agit d'une véritable
petite usine où 20 ouvriers seulement pouvaient produire 50 tonnes de minerai à
fondre par mois.
Mais le filon est épuisé.
En 1908, la mine est abandonnée et l'ensemble des installations est livré aux
ferrailleurs. L'établissement tombe en ruines et plusieurs bâtiments disparaissent avec la grande
crue de 1928. Aujourd'hui, le bâtiment de la laverie est le mieux conservé et
l'on reconnaît sans peine les infrastructures en béton des différentes machines.
Tous les exploitants ont
été confrontés à l'étroitesse des gorges du Torrent du Fournel. Celui-ci
fournissait bien sûr l'énergie hydraulique nécessaire au fonctionnement des
machines, mais constituait aussi une menace permanente à cause de la
violence de ses crues souvent sous estimées lors de la construction des
bâtiments. Ceux-ci sont installés sur les étroites berges qui se trouvent au
fond des gorges ; de ce fait, le traitement doit se faire dans plusieurs
ateliers distincts, se succédant le long du torrent, impliquant de nombreuses
ruptures de charge dans le processus d'enrichissement du minerai. On aménage
cette dispersion des installations en créant plus de 170 m de vois ferrées et en
édifiant une balance hydraulique de 8 m de hauteur. Lors de la dernière reprise
d'activité en 1906, le site des gorges est abandonnée et une nouvelle laverie
est édifiée plus en aval au débouché de la grande galerie d'écoulement. La
préparation mécanique du minerai peut alors se dérouler dans de meilleurs
conditions, mais le minerai doit transiter par un plan incliné souterrain de 250
m de long, puis par 600 m de voie ferrée en galerie.
La production au XIXe siècle
Pour tout le XIXe siècle
les quantités de minerai produites peuvent être estimées à partir des données
des comptes de redevances proportionnelles. Celles-ci nous fournissent la
production en quintaux métriques, sa valeur marchande et le détail des frais
d¹exploitation. Ces valeurs sont à la fois données par l'exploitant et par
l'administration et divergent fortement quelquefois.
La production totale de la
mine entre 1838, année du premier re-démarrage, et 1908, année de l'abandon
définitif, dépasse les 16000 tonnes de minerai marchand, ce qui correspond à
plus de 18 tonnes d¹argent, compte tenu de la richesse de la galène. L'essentiel
(87%) de cette production a été réalisé durant la période Suquet.
Elle correspond à l'abattage d'environ 45000 m3 de filon
Sous Surell sont produits 250 tonnes de minerai mal concentré soit
l'équivalent de 30 à 50 tonnes de schlich. Sous Duclos la
production s'élève à 70-90 tonnes de schlich par an. Avec Suquet,
l'activité de la mine décolle et atteint vers 1855 un niveau record de 800
tonnes. Les dévastations de la crue de 1856 stoppent net cette croissance, puis
durant les années 1860 la production décroît avec l'appauvrissement du gisement
et les difficultés d'exploitation. On note un redressement de la production sous
les compagnies anglaises, en partie causé par l'abattage des piliers et des
stocks laissés par les prédécesseurs. La reprise de 1892 est insignifiante. On
ne connaît pas précisément la production de la Compagnie des Bormettes,
mais il semblerait que la nouvelle laverie ait produit au moins 1000 tonnes de
schlich en 1907 ce qui correspondrait au dépilage du quartier de Sainte Barbe.
L'étude des registres du
personnel montre l'emploi, d'une part, d'ouvriers professionnels dont beaucoup
sont italiens, et, d'autre
part, d'ouvriers locaux moins expérimentés et payant un plus lourd tribut aux
accidents du travail. Plusieurs n'hésitaient pas à franchir le Col de la
Pousterle pour rejoindre la mine depuis Vallouise ou Pelvoux.
Les hommes travaillent plutôt sous terre alors qu'une forte proportion de femmes
et d'enfants est employée au traitement du minerai. Les ouvriers travaillent à
l'année. Les archives ne parlent pas d'absentéisme.
Il n'y a pas eu de
mouvement social significatif, seulement pour des raisons de paye en retard.
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